Carl Maria von WEBER
Pièce de concert pour piano et orchestre, op. 79, J 282
Friedrich GULDA
Orchestre Philharmonique de Vienne
Volkmar ANDREAE
10 et 11 septembre 1956, «Sofiensaal», Vienne
Carl Maria von Weber projeta de composer son «Konzertstück» - „Pièce de concert“ - en 1815 déjà; pour diverses raisons il mit ce projet de côté et ne le reprit qu'en 1819, pour - selon un récit de son fils Max Maria (Carl Maria von Weber, vol. 2, Leipzig, 1864–66, pp. 311 s.) - le terminer le 18 juin 1821 à Berlin, le matin de la première du «Freischütz», en jouant l'oeuvre pour son épouse Caroline et son élève Julius Benedikt:
Extrait cité de la publication «Carl Maria von Weber’s Konzertstück in F-moll (op. 79) historisch and kritisch erläutert» de Hermann KIPPER, parue dans le périodique «Der Klavier-Lehrer, Musik-paedagogische Zeitschrift, Organ der Deutschen Musiklehrer-Vereine und der Tonkünstler-Vereine zu Berlin, Köln, Dresden, Hamburg und Stuttgart. Herausgegeben von Professor Emil Breslaur - No. 10, Berlin, 15. Mai 1891, XIV. Jahrgang» en pages 117 à 120.
La pièce de concert est donc d'un seul tenant, toutefois structurée en 4 sections, jouées enchaînées: "[...] une introduction lente, un Allegro passionato brillant (un Adagio qui fait oeuvre de lien), une marche aux sons aigus des bois, (une transition rapide), et comme Finale, un Presto giocoso 6/8. La marche est célèbre pour une de ses entrées jouées seules au piano - un glissando flamboyant d’une octave conduit à un fortissimo tutti, intercalé à la perfection dans un contexte autrement inconséquent. Les glissandi animés du Finale étincellent tout autant. [...]"
Chacune des sections a un programme bien déterminé: dès le début Weber avait en tête l’ébauche d’un concerto à programme. Dans son ouvrage «Les illusions musicales et la vérité sur l'expression», le critique Johannes WEBER écrivait en 1900, traduisant le texte d'origine cité plus haut dans la publication de Hermann KIPPER (au haut de la colonne de droite):
"[...] Le programme du Concertstück de Weber est trop intéressant et trop peu connu pour que je ne le donne pas ici.
C'est en 1821, le matin du jour où devait avoir lieu la première représentation du Freischütz, que Weber acheva le Concertstück [4]; puis il en apporta les feuillets encore humides à sa femme, près de laquelle se trouvait Benedict, son élève favori. Il se mit gaîment au piano et joua le morceau d'un bout à l'autre, en traçant lui-même le programme, que Benedict nota ensuite de souvenir, mais que Weber ne voulut jamais laisser imprimer en tête de l'oeuvre.
Larghetto.—La châtelaine est à son balcon; elle interroge tristement l'horizon; son chevalier est parti depuis bien des années pour la Palestine. Le reverra-t-elle jamais? Des combats sanglants ont eu lieu, et aucun message de lui! En vain elle prie Dieu.
Allegro appassionato.—Soudain, un affreux tableau se présente à son esprit halluciné: il est étendu sur le champ de bataille, abandonné des siens; le sang coule à flots de sa blessure. Ah! que n'est-elle à ses côtés!... pour mourir du moins avec lui!...
Adagio et tempo di marcia.—Mais écoutez! quel bruit se fait entendre au loin! Des armures brillent au soleil, là-bas, sur la lisière de la forêt! Les arrivants s'approchent de plus en plus: ce sont des chevaliers et des varlets portant la croix; on voit flotter les bannières; on entend les cris du peuple, et là-bas, c'est lui!
Più mosso, presto assai. Elle vole au-devant de son bien-aimé; il se précipite dans ses bras. Quels élans d'amour! Quel bonheur indescriptible! Comme tout frissonne dans les bois et dans les blés, proclamant par mille voix le triomphe de l'amour fidèle!
Évidemment, il ne faut pas prendre ce programme au pied de la lettre, mais le sens général est incontestablement exact.
[...]
[4] Il ressort d'une lettre de Weber que le plan de l'oeuvre était déjà tracé dans son esprit en 1815. [...]"
Il faut souligner que ce programme fut noté par son élève Julius Benedict. De la main de Carl Maria von Weber lui-même, on ne connaît que ce qu'il écrivit dans une lettre adressée au critique Friedrich ROCHLITZ, datée du 14 mars 1815, citée dans la publication de Hermann KIPPER référenciée ci-dessus:
Quelques précisions données par Jean-Pascal VACHON:
"[...] Sur la base du programme (dont le propos pourra nous sembler naïf, voire kitsch), on pourrait presque qualifier ce concerto d’opéra sans parole dans lequel apparaissent des personnages. Il faut cependant se garder de voir en ce concerto une simple musique descriptive racontant une histoire de croisés. L’oeuvre peut et doit parfaitement s’apprécier en soi alors qu’on y entend une musique évoluant constamment et procédant organiquement dans une écriture «durchkomponiert».
Concerto d’un genre nouveau (que Weber lui ait donné le titre de «pièce de concert» plutôt que de «concerto» est révélateur), la structure formelle se libère ici de ses modèles classiques. Sorte de poème symphonique avec piano obligé en 4 sections jouées sans interruption, le Konzertstück est en fait le premier véritable concerto pour piano romantique et servira notamment de modèle à Franz Liszt (qui, du reste, inclura souvent l’oeuvre de Weber à ses programmes de concerts) quand il composera à son tour ses propres concertos pour piano.
[...]
La rareté de ces oeuvres au concert aujourd’hui peut étonner. Les oeuvres concertantes pour piano de Weber révèlent pourtant de nombreuses qualités: éclat de l’écriture qui permet au soliste de briller, subtilité de l’orchestration, profondeur de l’expression… Les premières publications de ces oeuvres où seules les parties séparées étaient disponibles alors que la partition complète – indispensable pour le chef d’orchestre – manquait n’ont certes pas aidée à leur diffusion à l’époque. Pas plus que le fait que Weber, ayant accédé à la popularité après 1821, ne joua plus ces oeuvres anciennes en public. Le titre prestigieux mais lourd de «créateur de l’opéra allemand» n’aurait-il pas finalement eu un effet négatif sur le reste de l’oeuvre considérable de Weber en le reléguant au rang de hors d’oeuvre certes agréables mais somme toute légers en face du mets de choix que fut Der Freischütz? [...]" cité des notes de Jean-Pascal VACHON publiées en 2020 dans le livret du CD BIS 2384.
Recto de la pochette du disque LONDON STS 15026
avec une reproduction des „
Jeunes filles au piano“ d'Auguste RENOIR
Volkmar ANDREAE enregistra cette „Pièce de concert“ entre les 10 et 11 septembre 1956 dans la «Sofiensaal» de Vienne avec l'Orchestre Philharmonique de Vienne et le jeune Friedrich GULDA en soliste, pour le label DECCA. Dans les mêmes sessions fut enregistré le concerto pour piano et orchestre op. 54 de Robert Schumann. Le tout fut publié sur les disques Decca LXT 5280 (avril 1957, en mono), LONDON LL 1589 (septembre 1957, en mono) et Decca CS 6082 (juillet 1959, en stéréo). L'enregistrement proposé ici provient de la réédition de 1968 sur le disque LONDON Stereo Treasury Series STS 15026.
La courte description publiée au verso de la pochette de ce disque STS 15026:
Voici donc...
Carl Maria von Weber, Pièce de concert pour piano et orchestre en fa mineur, op. 79, J 282, Friedrich Gulda, Orchestre Philharmonique de Vienne, Volkmar Andreae, 10 et 11 septembre 1956, «Sofiensaal», Vienne
Larghetto affettuoso - Allegro appassionato - Adagio-Tempo di marcia - Più mosso-Presto assai
16:07
Provenance: LONDON STS 15026
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