Les Sonates pour violoncelle No 1 et No 2, opus 5, sont deux sonates pour violoncelle et piano écrites par Ludwig van Beethoven en 1796, alors qu'il se trouvait à Berlin. Beethoven y rencontra le roi de Prusse Friedrich Wilhelm II, grand mélomane et violoncelliste passionné et à qui il dédia ces deux oeuvres. Selon Ferdinand Ries, Beethoven joua plusieurs fois à la cour, où il présenta entre autres ces deux sonates, composées pour Duport (premier violoncelliste du roi) et lui-même. Bien que Jean-Pierre Duport ait été l'un des professeurs du roi, on pense aujourd'hui que c'est son frère Jean-Louis Duport qui a eu l'honneur de donner ces sonates en première audition avec le compositeur.
Les deux sonates sont en deux mouvements, une longue introduction Adagio précédant un Allegro, suivie d'un Rondo Allegro. Elles sont souvent présentées comme étant en trois mouvement - le premier mouvement étant alors séparé en un Adagio et un Allegro, ce qui - dans l'état actuell des connaissances - n'est toutefois pas correct.
Recto du coffret Deutsche Grammophon 138-993--95 avec un extrait d'une peinture de Ferdinand Georg Waldmüller
Pierre FOURNIER enregistra cette oeuvre à plusieurs reprises pour le disque, au moins trois fois:
➣ avec Artur Schnabel, 23 juin 1948, EMI Studio No. 3, Abbey Road, London
➣ avec Friedrich Gulda, 23, 24 et 28 juin 1959, Musikverein, Brahms-Saal, Wien
➣ avec Wilhelm Kempff, 1-7 février 1965, Salle Pleyel, Paris
La courte introduction aux sonates pour violoncelle et piano publiée dans ce coffret Deutsche Grammophon 138-993--95, ainsi qu'une courte présentation des deux sonates de l'opus 5:
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Les sonates en duo pour piano et violoncelle, nouveauté que l’opus 5 de Beethoven introduisit en 1796 dans la musique de chambre, marquent l’émancipation définitive de la «petite basse» qui avait été inventée vers le milieu du XVIIème siècle et s’était jusque là contentée des fonctions de basse générale ou d’instrument d’orchestre. Le développement de l’emploi allait de pair avec celui de la technique. C’est vers 1770 que le virtuose Jean-Louis Duport, dont le jeu devait inciter Beethoven à écrire pour l’instrument, avait fixé les bases de la technique digitale et de celle de l’archet. La pique apparut vers 1800; elle assurait une tenue plus sûre à l’instrument et par là accroissait sa résonnance, permettait le plein épanouissement du timbre et l’emploi comme instrument mélodique.
Peu de temps auparavant, le violoncelle avait assuré le rôle de la basse fondamentale dans les trios et quatuors à cordes qui venaient de faire leur apparition; son importance s’affirmait parallèlement dans l’orchestre symphonique. La lignée des violoncellistes-virtuoses peut être remontée jusqu’à cette époque: les amateurs s’enthousiasmaient alors rapidement pour l’instrument qui devenait à la mode, et parmi eux le roi Frédéric Guillaume II de Prusse; c’est pour être agréable à ce mélomane que Mozart augmenta la part du violoncelle dans certains de ses derniers quatuors à cordes en lui confiant un rôle mélodique. Beethoven dédia au roi de Prusse les deux sonates en duo de l’opus 5, premiers-nés révolutionnaires de la littérature du violoncelle classique-romantique.
Ces deux sonates, composées pour Duport et la Cour de Berlin, sont à deux mouvements; les introductions adagio, aux vastes proportions et d’une profonde pensée, représentent le mouvement lent, le principe renouvelé de la sonate domine les premiers mouvements bien exposé tandis que les mouvements finals, surtout le rondo en ré majeur de la sonate en sol mineur, sont destinées à constituer une pièce de virtuosité. Le piano, comme il est concevable de la part d’un pianiste tel que Beethoven, s’adonne sans réserve à sa fonction accompagnatrice; il est traité brillamment, prend toute son importance dans les passages de grand style et relègue parfois le violoncelle dans l’ombre. Les premiers mouvements de ces deux oeuvres fourmillent d’idées; le développement dans la sonate en fa majeur module de la majeur à ré mineur dans les régions romantiques du ré bémol majeur, et l’allégro molto de la sonate en sol mineur qui s’élève après un prélude long et complexe, s’anime avec une force impétueuse dans le voisinage du pathétique. Les mouvements finaux montrent eux aussi des traits inhabituels; c’est ainsi que la tonalité de fa majeur n’est atteinte au début du bondissant finale à 6/8 de la première sonate qu’après de trompeuses modulations. Le rondo à 2/4 de la seconde sonate surprend par le rythme pointé de son intermezzo en ut majeur.
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Pierre FOURNIER et Wilhelm KEMPFF, une photo du Studio Laguens, Paris