Edward ELGAR
Concerto pour violoncelle en mi mineur, op. 85
Pierre FOURNIER
Orchestre Philharmonique de Berlin
Alfred WALLENSTEIN
20-23 octobre 1966, Jesus-Christus-Kirche, Berlin
Edward ELGAR termina de composer son concerto pour violoncelle au début de l'année 1919, dans son „cottage Brinkwells“ près de Fittleworth, Sussex.
"[...] De même que plusieurs autres partitions d'Elgar datant de cette période (le Quatuor à Cordes, la Sonate pour Violon, le Quintette avec piano), le Concerto pour Violoncelle témoigne d’un changement marqué de caractère tel qu’on le trouve dans la plupart des oeuvres du compositeur à la fin de la première guerre mondiale, au moment où la rhétorique, quelque peu ‘plastronnante’ et de place d’armes, des deux symphonies et des marches Pomp and Circumstance faisait place à une expression considérablement plus retenue, introspective, distillée même. Selon les mots du biographe d'Elgar, Michael Hurd, c’est de la musique “emplie de tristesse et de regret”, dans laquelle “le côté héroïque de l’imagination du compositeur est amoindri, réprimé par un écho fantomatique, harcelé par la mélancolie”. Le Concerto pour Violoncelle, selon une autre autorité, est “une consignation extrêmement sensible de la dernière mentalité du compositeur”. Elgar lui-même, alors qu'on lui demandait la “signification” de cette pièce, répondit simplement: “L'attitude d’un homme devant la vie”. [...]" cité des notes de Phillip Ramey - traduction de Pierre Malbos - publiées en 1985 dans le livret du CD CBS MK 39541.
Eward Elgar écrivait à un ami en juin 1919: «Je compose avec frénésie et suis sur le point d’achever un concerto pour violoncelle, une oeuvre vraiment imposante que je crois bonne et vivante.» (cité d'après Michael Kennedy). L'oeuvre en question fut remise à l'éditeur le 8 août et demeura la dernière composition importante d’Elgar - bien que le compositeur eût encore quinze ans à vivre. Elgar dédia cette oeuvre au couple Sir Sidney and Lady Frances Colvin, deux amis du musicien.
Sa première audition fut donnée le 27 octobre suivant, au Quenn's Hall de Londres, avec Felix Salmond, le London Symphony Orchestra étant dirigé par le compositeur.
Edward ELGAR, recto d'un tirage format carte postale, années 1900-1910
"[...] Les quatre mouvements du Concerto sont enchaînés deux à deux. Le premier d’entre eux, Adagio, est un récitatif émotionnellement très intense, qui se mue rapidement en un Moderato à 9/8 dont le thème vigoureux (A-B-A), exposé par les altos, se disséminera dans les autres mouvements, à l’exception du troisième. Un second motif à 12/8 est présenté par la clarinette puis repris par le soliste qui en déploie la richesse expressive et exploite son lyrisme en vastes gestes sensuels, avant de conclure par une section de pizzicatos qui ouvre la voie au court Lento, relayé par un Allegro molto qui prend en fait la tournure d’un «moto perpetuo» en sol majeur, caractérisé par un conflit plus affirmé entre les figures répétitives du violoncelle et les tentatives de récupération de l’orchestre qui semble être néanmoins soumis aux impulsions du soliste.
Les soixante mesures de l’Adagio en si bémol majeur constituent le coeur émotionnel de l’ouvrage: sans sentimentalité excessive, le compositeur livre là une de ses pages les plus doucement oniriques. Le quatrième mouvement est le plus développé: débutant par un Allegro torturé, il se transforme très vite en un Moderato intercalaire, lançant l’Allegro ma non troppo en forme de rondo en mi mineur qui retrouve l’élan et, progressivement, le climat du premier mouvement, dont il cultive les paroxysmes avec jubilation, faisant ressurgir la traditionnelle lutte entre soliste et orchestre avec une ardeur âpre, avant de s’achever dans un apogée fervent où le violoncelle, réexposant le thème initial, s’abandonne dans la magistrale coda qui clôt l’oeuvre avec panache. [...]" Cité des notes de Xavier de Gaulle publiées en 1999 dans le livret du CD Virgin CLASSICS 7243 5 45356 2 8.