Gabriel FAURÉ
Requiem, op. 48
Pierrette ALARIE, soprano, Camille MAURANE, baryton
Maurice DURUFLÉ, orgue
Choeur Elisabeth Brasseur
Orchestre des Concerts Lamoureux
Jean FOURNET
25 et 26 juin 1953, Église Saint Étienne-du-Mont, Paris
"[...] Mon Requiem, on a dit qu’il n’exprimait pas l’effroi de la mort, quelqu’un l’a appelé une berceuse de la mort. Mais c’est ainsi que je sens la mort: comme une délivrance heureuse, une aspiration au bonheur d’au-delà, plutôt que comme un passage douloureux... Mon Requiem a été composé pour rien... pour le plaisir si j'ose dire... Peut-être ai-je ainsi, d’instinct, cherché à sortir du convenu, voilà si longtemps que j’accompagne à l’orgue des services d’enterrement! J’en ai par-dessus la tête. J’ai voulu faire autre chose [...]" Citation publiée dans Comoedia de 1954 en page 6, provenant d'un interview de Gabriel Fauré fait par Louis Aguettant le 12 juillet 1902.
Pour la suite de la présentation de l'oeuvre, voir cette page de mon site avec l'enregistrement qu'Ernest Ansermet en a fait en 1955.
Le texte et sa traduction:
En juin 1953, dans l'Église Saint Étienne-du-Mont de Paris, Jean FOURNET enregistra cette oeuvre pour Philips, avec de superbes interprètes: Pierrette ALARIE, soprano, Camille MAURANE, baryton, Maurice DURUFLÉ, organiste titulaire de l'Église Saint Étienne-du-Mont, la Chorale Élisabeth Brasseur, l'Orchestre des Concerts Lamoureux. Elle fut publiée peu après sur les disques Philips A 00669 R (recto de la pochette ci-dessus, semblant exprimer l'aspect „berceuse de la mort“) et EPIC LC 3044 (disque utilisé pour cette restauration) avec une pochette exprimant plutôt l'aspect „effroi de la mort“:
Cité des notes de Claude ROSTAND publiées au verso de la pochette du disque 10'' Philips A 00669 R:
"[...] Le Dieu de Fauré n'est certes pas celui de la Bible en l'honneur de qui Berlioz a fait donner toutes ses superbes catapultes, non plus que celui, merveilleusement théâtral et milanais, que Verdi nous propose avec une irrésisitible séduction.
Le Dieu de Fauré, c'est le Dieu de l'Évangile. Et encore non à la manière de Couperin, ni même à celle du tendre père Franck chez qui on l'entendait encore de temps à autre faire la grosse voix.
Le Dieu de Fauré ne veut pas entendre parler de châtiments éternels. Il est, avant tout, l'esprit de confiance totale, de consolation, d'amour, et surtout de pardon et d'espoir. C'est un Dieu très humain. De cela, une vérification très importante nous est fournie par l'ouvrage du fils du compositeur, Philippe Fauré-Frémiet qui, après avoir précisé que Fauré «quoique vivant dans l'atmosphère des églises, n'était pas croyant, mais pas sceptique», ajoute «Gabriel Fauré se garde de décrire les Cieux et leurs félicités, aussi bien que le Jugement et ses terreurs... mais ne voulant décrire le Ciel, il arrive qu'il le laisse entrevoir parce qu'il quitte franchement la terre, parce qu'il rejette ce qu'il y a de passionnel dans la prière, c'est-à-dire la terreur. Son oeuvre est la véritable conduite des morts».
Il est si paternel, ce Dieu de Fauré, que l'on entend assez souvent, de la bouche même de musiciens authentiques, éclairés et tolérants, faire le reproche d'être plus voisin de l'esthétique dite de Saint Sulpice que de notre grand art religieux français traditionnel. Cela est bien injustement méconnaître l'essentielle pureté qui se dégage de cette oeuvre. Sans doute ne s'agit-il ici ni du colossal, ni du dépouillé de nos grandes cathédrales. Il y a, chez Fauré, une réserve à la fois familère et hautaine que sont loin d'avoir ces romantiques décors.
[...]Le Kyrie est de style sobre et sévère, et c'est le seul morceau où règne un peu d'angoisse. L'Offertoire, adagio molto, lui succède dans un caractère secrètement pathétique. Le Sanctus, dont les suaves effusions évoquent des légions d'ailes frémissantes, est construit sur une mélodie de caractère archaïque très étrangement expressif. Le doux Pie Jesu - qui fut créé, en soliste, par un jeune garçon de dix ans qui devint plus tard le compositeur Louis Aubert - déploie une mélodie implorante et pleine de confiance.
L'Agnus Dei est un andante dont la tendre phrase initiale, plusieurs fois reprise, est un miracle de pureté expressive; un peu d'effroi s'introduit ensuite dans la prière, mais juste ce qu'il en faut pour satisfaire à l'exigence du texte, et sans qu'aucune désolation n'y paraisse jamais. Le Libera me, qu'expose d'abord le baryton solo sur un accompagnement obstiné, est un des plus beaux moments de l'oeuvre; plus que jamais ici, malgré le sentiment qui se dégage de ce texte terrifiant, la parure mélodique et harmonique exprime la confiance et l'abandon total, et l'on pense à ce que seront les dernières paroles de Fauré mourant: «Et puis, jugez, mon Dieu». Le ré majeur de l'In paradisum termine l'oeuvre sur une vision célest et sereine, pleine d'apaisement. [...]"
Voici donc...
Gabriel Fauré, Requiem, op. 48 (version symphonique de concert, 1900), Pierrette Alarie, soprano, Camille Maurane, baryton, Maurice Duruflé, orgue, Chorale Elisabeth Brasseur, Orchestre des Concerts Lamoureux, Jean Fournet, 25 et 26 juin 1953, Église Saint Étienne-du-Mont, Paris
01. Introït et Kyrie 06:55 (-> 06:55)
02. Offertoire 08:45 (-> 15:40)
03. Sanctus 02:57 (-> 18:37)
04. Pie Jesu 03:50 (-> 22:27)
05. Agnus Dei 05:42 (-> 28:09)
06. Libera me 05:16 (-> 33:25)
07. In paradisum 03:30 (-> 36:55)