À l'origine de la suite «Masques et bergamasques», Op. 112, de Gabriel FAURÉ est une commande du prince de Monaco que le compositeur reçut en septembre 1918: il s'agit d'un divertissement en un acte avec comme protagonistes trois personnages de la Comédie italienne: Arlequin, Gilles et Colombine. À l'origine, la partition complète comportait huit morceaux, dont trois faisaient appel aux voix (le Madrigal à quatre voix pour choeur, ainsi que deux mélodies, Le plus doux chemin et Clair de lune, confiées au ténor) et reprenaient des compositions antérieures.
Le nom «Masques et bergamasques» n'implique pas un programme particulier: ce nom est repris du début du poème «Clair de Lune» de Verlaine - mis en musique par Gabriel Fauré dans la pièce homonyme de son ballet:
"[...] Votre âme est un paysage choisi Que vont charmant masques et bergamasques Jouant du luth et dansant et quasi Tristes sous leurs déguisements fantasques. [...]"
La suite d'orchestre que Gabriel Fauré réalisa un peu plus tard retient les quatre pages les plus récentes du ballet, terminées à Menton en février 1919: Ouverture, Menuet, Gavotte, Pastorale.
"[...] De l'Ouverture (Allegro molto vivo), Fauré écrivait à son épouse: «Reynaldo Hahn dit que cela ressemble à du Mozart qui aurait imité Fauré» Jean-Michel Nectoux, le meilleur spécialiste français de Fauré, a retrouvé l'origine de cette pièce, toute de légèreté, dans un Intermezzo pour orchestre joué à Rennes en 1868, et dans l'Intermède de symphonie à quatre mains de 1869. Un essai repris cinquante ans plus tard, mais surtout, un écho précieux du style adopté par le compositeur dans sa jeunesse.
Moins intéressant, malgré son charme indéniable, le Menuet (Tempo di minuetto, Allegro moderato) qui emprunte, lui aussi, quelques éléments à une composition de jeunesse, la Suite d'orchestre en fa (op. 20), et dont la solennité théâtrale fait penser à un pastiche quelque peu figé.
Avec son rythme franc et incisif, la Gavotte (Allegro vivo) vient rompre un instant la mélancolie souriante dont toute cette oeuvre est empreinte. L'origine de cette pièce remonte à la Gavotte pour piano de 1865, reprise dans l'opus 20, inédit.
Mais la nostalgie revient avec la Pastorale (Andante tranquillo) qui clôt cette suite, et dont le style est du plus pur Fauré « dernière manière ». Mis en relief par les sonorités soyeuses des cordes, le chant déploie sa douceur jusque dans la citation du thème de l'Ouverture, et reste l'un des plus envoûtants du compositeur. [...]" cité du Guide de la musique symphonique réalisé sous la direction de François-René Tranchefort, Fayard 1986, ISBN 978-2-213-64075-4
La suite «Masques et bergamasques» fut donnée en première audition à Paris, Société des concerts du Conservatoire, le 16 novembre 1919.