Felix MENDELSSOHN
Symphonie No 5, op. 107, MWV N 15, dite „Réformation“
Orchestre Symphonique de la Radio Bavaroise
Rafael KUBELIK
10 et 11 janvier 1974
Salle Hercules de la Résidence de Münich
Malgré son numéro d'ordre - 5e - et son numéro d'opus - 107 - élevés, la Symphonie „Réformation“ est chronologiquement la seconde que Felix Mendelssohn écrivit pour grand orchestre. Il en commença la composition fin 1829, juste après être rentré à Berlin de son premier séjour dans les Îles Britanniques, et il la destinait à marquer, l'année suivante, le tricentenaire de la Confession d'Augsbourg (Confessio Augustana), l'assemblée qui avait défini les croyances fondamentales de la Réforme luthérienne.
Dans sa composition, Felix Mendelssohn allie, annonçant en cela Bruckner, le statisme du choral et la dynamique symphonique. Pour point de départ dans l'Andante introductif, il prend l'„Amen de Dresde“, motif de quinte s'élevant par degrés qui provient de la liturgie luthérienne. Dans le finale s'y ajoute le cantique luthérien „Ein' feste Burg ist unser Gott“ (C'est un puissant rempart que notre Dieu). Le traitement contrapuntique se rencontrant dans les mouvements extrêmes résultait presque tout naturellement du caractére archaique des deux thèmes; ce fut précisément ce travail polyphonique qui prévint les orchestres de Paris et Berlin contre la partition, si bien que Mendelssohn ne fit pas imprimer cette oeuvre - qu'il voulait méme voir brûlee!
Dans sa rude opposition de groupes de cordes et de vents, l'introduction, à laquelle préside l'„Amen de Dresde“, produit l'impression d'une anticipation de Bruckner. L'Allegro con fuoco, parsemé des réminiscences de l'introduction, est une combative marche accélérée “protestante“, plus abrupte que d'autres mouvements initiaux de Mendelssohn. Les deux mouvements intermédiaires constituent des interludes, des tributs à la règle sacrée de la coupe en quatre mouvements que devait revêtir une symphonie.
Un Scherzo, marqué Allegro vivace, naît d'un thème en tierces joué en anacrouse par les bois puis est interrompu par une souple et tendre mélodie, formant quasiment un trio.
Les premiers violons dictent le ton dans l'Andante récitatif, presque entierement écrit pour cordes, introduction pleine de retenue à la paraphrase finale sur „Ein' feste Burg“. La flûte solo commence „andante con moto“ en exposant le motif essentiel. Une explication contrapuntique, portée à une grande intensité dramatique, fait passer à un autre prélude, en l'occurence un Allegro vivace. Les deux préludes s'avèrent constituer des ponts, dans la tonalité de la sous-dominante, menant à l'Allegro maestoso. La mélodie de Luther - transformée en un thème par Mendelssohn - est entonnée par l'orchestre au complet. Le cantique luthérien se présente comme cantus firmus dans le développement, où il fait l'objet d'une fantaisie symphonique sur le choral, puis il détermine la reprise et se fait valoir en accords lapidaires dans les dernières mesures.
L'oeuvre fut certes achevée en mai 1830 pour être jouée dans le cadre des festivités de la commémoration de la Confession d'Augsbourg. Cependant, ces dernières durent étre annulées suite aux tumultes survenus au lendemain de la Révolution de Juillet. La partition fut remise dans le tiroir pendant deux ans avant qu'une nouvelle occasion de la jouer se présente, cette fois-ci à Paris. Mais le projet fut de nouveau avorté: après la première répétition, l'Orchestre du Conservatoire de Paris refusa de jouer la symphonie, prétextant qu'elle était “trop scolastique”. “Trop de fugato, pas assez mélodieuse” en fut la justification sommaire.
Après le refus de Paris, il s'avéra impossible de jouer l'oeuvre à Londres. De nouveau, plusieurs mois s'écoulèrent jusqu'à ce qu'elle put enfin être interprétée à Berlin, le 15 novembre 1832 (dans la version finale que le compositeur avait entretemps revisée), dans le bâtiment de l'Académie de Chant de Berlin, sous le titre de «Symphonie zur Feier der Kirchen-Revolution» (Symphonie pour célébrer la Révolution de l'Eglise). Elle ne fut publiée qu'en 1868, à titre posthume, par l'éditeur N. Simrock (Bonn).
Un court complément d'informations sur ses différents mouvements cité des notes de Lindsay Kemp publiées en 2015 dans le livret du SACD LSO Live LSO0775:
"[...] Le premier mouvement s'ouvre par une introduction lente dans laquelle un contrepoint aux lentes ondulations et des fanfares de plus en plus pressantes conduisent à deux énoncés éthérés, aux cordes aiguës, d'un motif ascendant de six notes connu sous le nom d'„Amen de Dresde“. Selon certains commentateurs, cette référence à la liturgie catholique avait pour dessein de représenter l'ancienne Eglise acculée par la controverse et, de fait, lorsque la musique se jette dans l'Allegro proprement dit (en passant au mode mineur), c'est dans un climat de lutte et d'agitation. À la fin de la section centrale de développement, le motif de l'„Amen“ revient; il fait à présent pénétrer dans une réexposition au ton feutré, mais qui progresse à nouveau vers un sommet d'intensité tumultueux.
Le Scherzo est tout de grâce et de légèreté mais, bien qu'il semble s'écarter du climat général de la symphonie - il est plus bucolique que révérencieux -, il conserve des liens thématiques avec les motifs descendants des bois au tout début.
Par sa brièveté, le solennel troisième mouvement donne l'impression d'être conçu en partie comme une introduction au finale - cette impression est renforcée par une phrase de violon dans le style d'un récitatif. Le finale débute par un énoncé aux chaudes harmonies d'„Ein' feste Burg ist unser Gott“, qui prélude à une forme sonate. Le choral s'invite occasionnellement au milieu des thèmes propres de cette sonate, et sa dernière apparition offre à la partition une conclusion en majesté. [...]"
L'interprétation qui en est proposée ici provient d'un concert donné les 10 et 11 janvier 1974 (6e concert de la saison 1973-1974) à Munich, Salle Hercules de la Résidence, Rafael KUBELIK dirigeait l'Orchestre Symphonique de la Radio Bavaroise. Au programme:
-► Ludwig van Beethoven, Ouverture d'Egmont, op. 84
-► Felix Mendelssohn, Symphonie No 5 en si bémol majeur
-► Antonin Dvorak, «Die Waldtaube»
-► Peter Tschaikowsky, Ouverture-fantaisie Roméo et Juliette
1. Andante - Allegro con fuoco 10:43 (-> 10:43)
2. Allegro vivace 05:40 (-> 16:23)
3. Andante (attacca) -> 20:09:220
4. Choral „Ein' feste Burg ist unser Gott“
Andante con moto - Allegro vivace —
Allegro maestoso 12:35 (-> 28:58)