Le ballet Namouna naquit d'une commande du directeur de l'Opéra de Paris, Vaucorbeil, qui, ne pouvant ou ne voulant pas produire Le Roi d'Ys, demanda à Lalo un ballet, en précisant que le scénario devait être d'Henri Blaze, un ami qu'il souhaitait aider par la même occasion. Lalo reçut le scénario le 21 juillet 1881 et disposa de quatre mois pour composer sa partition. Travaillant quatorze heures par jour, il réussit sa tâche, mais avant que l'orchestration ne soit achevée, il tomba gravement malade. Vingt jours de grâce lui furent accordés pour achever la partition. Cela ne put toutefois suffire que grâce aux visites quotidiennes de Charles GOUNOD, qui écrivit les dernières séquences sous les instructions de Lalo. La première représentation fut donnée le 6 mars 1882- quinze représentations suivirent avant que le ballet Namouna soit retiré du programme.
Lalo prépara lui-même les suites orchestrales par lesquelles le Ballet Namouna resta connu dans les salles de concert. Trois mouvements de la première suite furent donnés en première audition le 7 janvier 1883, sous la direction de Lamoureux, qui dirigea également le dernier mouvement le 16 mars 1884. La deuxième suite fut donnée en première audition sous la direction de Gustave Doret à la Societé Nationale le 3 novembre 1895.
Namouna souffre d'un scénario plutôt extravagant... L'intrigue se déroule dans un archipel grec au XVIIe siècle. Dans une maison de jeu de Corfou, deux seigneurs, Ottavio et Adriani, jouent aux dés. Ottavio gagne tout ce qui appartient à Adriani, y compris la belle esclave voilée Namouna. Frappé par son charme et sa grâce, Ottavio lui rend sa liberté et lui offre les richesses qu'il a gagnées d'Adriani. Ce dernier provoque une querelle avec Ottavio, qu'interrompt Namouna, déguisée en fleuriste. Elle tente en vain de gagner l'amour d'Ottavio, mais celui-ci est épris de la jeune et jolie Helena. Namouna réussit cependant à sauver la vie d'Ottavio, car sa bande de marins met en fuite les ruffians engagés par Adriani. Les marins capturent Ottavio et le conduisent sur un bateau où l'attend une femme voilée: c'est, bien sûr, Namouna. Le bateau les emmène sur une île où les compagnons de Namouna en servitude sont libérés par sa générosité. Adriani les poursuit avec une bande de pirates, mais les filles esclaves et la boisson les désarment. Ottavio est sauvé, Adriani est terrassé et le couple désormais heureux, Ottavio et Namouna, s'échappe, accompagné des esclaves libérés.
Les quatre parties de la première suite:
1. Prélude: Lalo le plaça à l'origine entre le prologue et le premier acte, mais l'utilisa plus tard comme prélude au ballet. Il décrit le voyage en mer d'Ottavio et de Namouna, avec deux thèmes: l'air pour violoncelle qui monte en puissance et conclut brillamment le mouvement, et une phrase plus calme, courbée et insinuante, pour les cordes aiguës, soulignée par les bois. La première représente la barque de l'amant ou la mer; la seconde, Namouna elle-même.
2. Sérénade: Un allegro scintillant en 3/16, pour cordes en sourdine, divisées et pincées, bois et harpes. Dans le ballet, il accompagne la scène du premier acte où les musiciens d'Helena jouent sous son balcon devant le port de Corfou.
3. Thème varié: Quelques mesures d'introduction conduisent au thème mélodieux, joué par les violons et les altos, que Lalo varie avec une animation croissante. Ce Thème varié accompagne le Pas des Corbeilles du second acte.
4. a) Parade de foire: Un allegro vivace en 3/8 dans lequel une succession de phrases en forme de fanfare dépeint la Fête des Rameaux, jour de carnaval à Corfou. Un solo de flûte légèrement accompagné y est associé. Dans le ballet, il s'agit d'une danse du second acte. b) Fête foraine: Un presto en 3/8 qui conclut le premier acte.
Les 21 et 25 avril ainsi que le 8 mai 1955, dans le Kingsway Hall de Londres, furent enregistrées les deux suites du ballet Namouna d'Édouard LALO, Jean MARTINON dirigeant l'Orchestre Philharmonique de Londres (LPO). Le tout fut publié en décembre 1955 sur ce disque London LL 1268 (et en février 1956 sur le disque Decca LXT 5114). Jean Martinon les réenregistra en 1970 avec l'Orchestre National de l'ORTF, pour le label Deutsche Grammophon. C'est pourquoi ces enregistrements de 1955 tombèrent dans l'oubli.