Karl Amadeus HARTMANN
Symphonie No 1 pour alto et orchestre,
sous-titrée «Essai pour un Requiem»
Nata TÜSCHER
Orchestre de la Suisse Romande
Hermann SCHERCHEN
10 septembre 1958
Cette symphonie fut d'abord écrite en 1936 sous forme d'une cantate pour alto solo et orchestre, utilisant des traductions de poésies de Walt Whitman; en 1938, Karl Amadeus Hartmann lui donna le sous-titre «Notre vie: Fragment Symphonique», avec l'intention de présenter l'oeuvre comme un commentaire sur les conditions de vie sous le régime nazi. Bien entendu, comme presque toutes les oeuvres de Karl Amadeus Hartmann composées pendant ces sombres années, elle ne fut jamais jouée. L'oeuvre fut remaniée en 1947/48, puis revisée en 1950, (alors baptisée «Miserae»), et une dernière fois revisée en 1954-55.
Sa version revisée de 1947/48 fut donnée en première audition en mai 1948 à Radio Francfort avec l'orchestre symphonique local sous la direction de Winfried Zillig. La version définitive - écrite pour alto (sauf le mouvement central, purement orchestral) et grand orchestre, avec triple bois et cor anglais, clarinette basse, contrebasson ainsi que quadruple cuivres, 3 timbales, percussion, piano, harpe, célesta et cordes, dédicacée à Franz André, Bruxelles, «in Freundschaft und Verehrung zugeeignet» - fut donnée en première audition le 22 juin 1957 par Hilde Rössl-Majdan et l'Orchestre Symphonique de Vienne sous la direction de Nino Sanzogno.
Quelques commentaires de Ulrich DIBELIUS, avec les textes chantés:
"[...] I. Introduktion: Elend
Erregter ,gestischer’ Allegro-Satz mit klanglich zurückgenommenem Largo-Mittelteil, in dem die Altstimme quasi rezitativisch Worte von Walt Whitmann (wie bei den anderen Sätzen aus der Gedichtsammlung Grashalme - Leaves of Grass) vorträgt:
Ich sitze und schaue aus auf alle Plagen der Welt
und auf alle Bedrängnis und Schmach -
ich sehe die Mühsal der Schlacht, Pestilenz, Tyrannei,
sehe Märtyrer und Gefangene -
ich beobachte die Geringschätzung und Erniedrigung,
die die Armen von Hochmütigen zu erleiden haben;
auf alle Gemeinheit und Qual ohne Ende,
schaue ich sitzend hin,
sehe und höre.
II. Frühling
Impulsiver Allegro con brio-Einsatz des Orchesters verlangsamt sich zu einem liedhaften Largo mit Solostimme:
Als jüngst der Flieder blühte vor der Tür,
und der Stern am Himmel früh in die Nacht sank,
trauerte ich, und werde trauern mit jedem Frühling neu. -
- Molto espressivo:
So oft du, Frühling, ach Frühling, wiederkehrst,
Freiheit immer wirst uns bringen:
Flieder blühend jedes Jahr, Elend ach, gibst du uns all’.
Und Gedanken an den Tod, der uns nah’.
III. Thema mit vier Variationen
Einziger Instrumentalsatz, Langsam, dessen Thema - nach 8 Einleitungstakten von der Solo-Bratsche vorgetragen - aus Hartmanns Oper ,Simplicius Simplicissimus’ (1934/ 35) stammt. Die Variationen steigern sich von der ersten, etwas schneller - schattenhaft (mit solistischem Paukenbeginn), über die bewegtere zweite zur dritten, sehr bewegt (appassionato), und münden beruhigter in die vierte (Choral) nur für Bläser und Schlagzeug.
IV. Tränen
Trauermarschartige Aussenteile, Langsam, von denen der erste rein orchestral abläuft, umrahmen ein Lied (wie im II. Satz), dessen Ausdrucksgehalt zu einem Höhepunkt führt:
Tränen, Tränen, Tränen!
In der Nacht in der Einsamkeit,
tropfend herab auf den weissen Strand
eingesogen vom Sand nirgends, nirgends ein Stern, ein Stern!
Alles, alles öde und schwarz, -
nasse Tränen aus eines vermummten Hauptes Augen;
- Piü mosso (drammatico):
O wer ist dieser Geist?
Diese Gestalt im Dunkeln, voll Tränen, voll Tränen?
- stringendo:
Was für ein formloser Klumpen
gebeugt, gekrümmt, dort auf dem Sand? -
- vorwärts:
Schluchzende Tränen,
wilde Schreie vom Jammer geschüttelt?
- noch mehr steigern! zum Höhepunkt und über zwei AndanteTakte für Klavier solo wieder zurück zum Langsam:
O Schatten, o Schatten,
so ruhig und würdig bei Tage,
mit gelassenem Angesicht und gemessenem Schritt.
Aber nun, da du hinfliehst in Nacht,
wenn keiner dich sieht,
o schmelzender Ozean von Tränen!
Tränen, Tränen!
V. Epilog: Bitte
Nach einem Takt Generalpause sofort an das Lied Tränen anschliessend, Andante, aber im Ausdruck auf Minimales reduziert. Anfangs nur Sprechgesang zu Schlagzeug und Pauken:
Ich hörte die Allmutter,
als sie gedankenvoll auf all ihre Toten schaute,
verzweifelt, auf all die verzerrten Leiber,
all die im Elend zugrunde gegangenen Menschen,
als ihrer Erde sie zurief mit klagender Stimme,
indes sie dahinschritt:
- und nach kurzem melodischem Ausbruch psalmodierend wie in der Introduktion
Ach nimm sie wohl auf, o meine Erde,
ich trage dir auf, meine Söhne, meine Schwestern nicht zu verlieren
und ihr Ströme, nehmt sie wohl auf,
nehmt auf, nehmt auf ihr teures Blut,
und ihr Stätten hier und dort und Lüfte,
die ihr droben unfühlbar schwimmt,
und all ihr Säfte von Erdreich und Wachstum!
O meine Toten!
Hauche sie aus, ewiger süsser Tod, nach Jahren, Jahrhunderten. [...]"
L'interprétation proposée ici en écoute provient d'un concert donné à Genève par Hermann Scherchen dirigeant l'Orchestre de la Suisse Romande:
Un extrait du compte-rendu de ce concert, publié le surlendemain dans le Journal de Genève en page 11, signé 'Ami Ch.':
"[...] Le concert des «Rencontres» - Musiques de notre temps
Ce titre l’indique, les chefs-d'oeuvre consacrés, classiques ou modernes, étaient cette fois-ci bannis du programme du concert offert comme chaque année par la Fondation des émissions de Radio-Genève aux hôtes des Rencontres internationales. L’esprit le plus large, ouvert à toutes choses, règne dans notre studio radiophonique. Sachons gré à ses dirigeants de nous avoir donné l’occasion d’entendre des pages comme celles, intéressantes à des titres divers, de Karl Amadeus Hartmann (1905), Yannis Xenakis (1921), Rolf Liebermann (1910), Luigi Nono (1926) et Arnold Schonberg, exécutées mercredi par l’OSR sous la direction d’Hermann Scherchen.
Dans une forte pertinente notice du programme, Roger Vuataz exhortait les auditeurs «à écouter sans préjugé ces oeuvres qui, si elles ne sont pas du goût de tous, n’en ont pas moins la valeur d’un document d’époque». On ne saurait mieux dire; si bien que dans la mesure où se pouvait être décelé un fond d’authenticité sous tout ce que l’oeuvre avait de déroutant - je pense maintenant à Xenakis - le public, bien que dérouté, fut touché juste et donna son consentement.
De toutes les oeuvres entendues, la plus forte, la plus significative, était bien cette «Symphonie No 1», pour voix d’alto et orchstre, sur des textes de Whitman, du Munichois Karl Amadeus Hartmann. Tempérament puissant, artiste à la personnalité fortement originale, Hartmann, dès ses débuts, voici quelque 25 ans, proclama ses tendances avancées. Mais rien dans sa musique, et c’est probablement là ce qui fait sa force, ne rompt systématiquement avec l’art dit traditionnel. Neuve, originale on ne peut plus, la musique d’Hartmann est donc perméable à tout public éclairé ou, plus simplement, doué de sensibilité. De sensibilité, cette «Symphonie» est débordante (Mme Nada Tüscher, qui en chantait la partie vocale, en eut aussi à revendre, et de la pénétration tout autant). Comme Debussy dans «Pelléas», comme Bartok dans «Le Château de Barbe-Bleue», ou Rameau dans «Platée», Hartmann, pour chaque mot, pour chaque situation, trouve infailliblement l’accent juste.
[...]
Aura-t-on assez admiré le tour de force accompli par cette phalange de virtuoses qu’est devenu, du premier musicien au dernier, notre Orchestre de la Suisse romande? On s’en doute, les musiques évoquées ici sont souvent d’une terrible difficulté, mais, excepté pour celle de Nono, d’une difficulté qui n’a rien de gratuit. Et que dire d’Hermann Scherchen, prodigieux de maîtrise devant ces partitions dont il est depuis toujours l’intelligent défenseur? [...]"
Comme pour toutes les oeuvres de Karl Amadeus HARTMANN, je ne peux - pour le moment - vous proposer cet enregistrement qu'en écoute - par l'intermédiaire d'un iframe embarqué du splendide site archive.org, plus exactement de cette page - ses oeuvres ne tombant dans le domaine publique qu'en 2034.
Karl Amadeus Hartmann, Symphonie No 1 pour alto et orchestre d'après des textes de Walt Whitman, sous-titrée «Essai pour un Requiem», Nata TÜSCHER, Orchestre de la Suisse Romande, Hermann SCHERCHEN, 10 septembre 1958
1. Introduction: Misère, texte tiré de «I Sit and Look Out» -> 03:27
2. Printemps, texte de «When Lilacs Last in the Dooryard Bloom'd» -> 14:30
3. Thème avec quatre variations -> 16:43
4. Larmes, texte de «Tears» -> 23:51
5. Épilogue: Supplication, texte de «Pensive on her Dead Gazing» -> 26:45
Provenance: Radiodiffusion, cette page du site archive.org