Wolfgang-Amadeus MOZART
Symphonie concertante pour violon, alto et orchestre
en mi bémol majeur, KV 364 (KV 320d)
Aïda STUCKI, violon, Hermann FRIEDRICH, alto
Radio-Orchestre de Zurich
Pierre COLOMBO
diffusé le 7 décembre 1958 sur l'émetteur de Beromunster
Pour une courte présentation de cette oeuvre, voir cette page de mon site.
Sur ses trois mouvements, cité d'un superbe texte de Marcel MARNAT, musicologue, journaliste et producteur de radio français, publié en 1981 dans le livret de l'album CBS Masterworks (M2 36936 / 79236 / CBS 79236):
"[...] Il faut remarquer aussi que non seulement solistes et orchestre dialoguent entre eux mais encore que cette “conversation” s’établit aussi avec les différents groupes d’un orchestre très soigné (hautbois, cors, cordes avec altos divisés) et entre ces groupes entre eux. La Symphonie Concertante apparaît ainsi comme une prolongation symphonique des concertos généralisés qu’avaient été les Brandebourgeois nos 3 et 6 par exemple (oeuvres que Mozart ne pouvait qu’ignorer).
Cette dramaturgie expansive se retrouve au niveau des thèmes. Non point que ceux-ci soient “innombrables” comme dans le Concerto pour flûte et harpe (autre forme de “symphonie concertante” écrite à Paris) mais plutôt parce qu’ils entretiennent entre eux des rapports de cause à effet qui lie les diverses parties de la partition, l’unifiant au niveau d’un raisonnement conduit avec cohérence. C’est ici que pour la première fois un oeuvre en trois mouvements devient véritablement ce qu’elle voudra être plus tard: thèse, antithèse, synthèse ou, si l’on préfère, affirmation, méditation, résolution du conflit des deux premières parties.
L'Allegro maestoso, s’affirme donc le premier mouvement. En fait Mozart n’a jamais été aussi douloureux. Rien qui crie ni qui pleurniche, bien sûr, mais une autorité grave qui en dit long sûr l’effort de volonté supposé par un tel sursaut: affirmation de vivre et de produire avec noblesse, quels que soient les abîmes d’amertume côtoyés. On entend ici chanter un Mozart à nouveau désespérément prisonnier de l'Archevêque Colloredo: l’orchestre a parfois des colères d’orgue et la façon dont les solistes se glissent hors du tutti indiquerait presque comment le compositeur rêve d’aller chanter ailleurs que dans ce monde sourdement hostile (autre signe: les cadences sont de Mozart, à une époque où les compositeurs en laissaient l’improvisation à leurs interprètes).
Le plus étonnant du merveilleux second mouvement (Andante en ut mineur, tonalité tragique rare chez Mozart) est peut-être l’ampleur de sa respiration, ampleur douloureuse qui l’amène à de subtils ralentissements, à d’admirables amincissements du son et même à des arrêts. Ces suspensions ne sont plus des pauses mais des instants d’absence, de distraction, chèrement conquis dans un univers contrit: on notera que la sonorité pathétique de l’alto domine largement. La méditation tend donc, d’un bout à l’autre, à réconcilier les voix semblables et pourtant divergentes d’une âme qui s’interroge.
La “résolution” apportée par le finale, Presto, est-elle aussi dominée par la voix alarmante de l’alto. Il y reparaît un dessin des cors apparu dans le premier mouvement. Le musicien ne cède pas à la tentation d’un finale enjoué. L'oeuvre se replie sur elle même, animée et courageuse mais amère et grave. C’était l’époque où Mozart disait „tables et chaises sont mes seuls auditeurs”. [...]"
L'enregistrement proposé ici fait partie d'un „concert symphonique“ diffusé le dimanche 7 décembre 1958 sur l'émetteur de Beromunster, Pierre COLOMBO dirigeant un orchestre nommé «Radio-Orchestre de Zurich» (*), avec Aïda STUCKI, violon, et Hermann FRIEDRICH, alto, en solistes. Je n'ai pas encore pu trouver d'informations sur la prise de son elle-même.
(*) Il s'agissait probablement d'un „reste“ de la formation connue auparavant sous le nom d'Orchestre de Radio Beromunster: la fin des années 1950 était marquée par un transfert de l'orchestre de Radio Beromunster vers Bâle, pour des raisons économiques.
Wolfgang-Amadeus Mozart, Symphonie concertante pour violon, alto et orchestre en mi bémol majeur, KV 364 (KV 320d), Aïda Stucki, violon, Hermann Friedrich, alto, Radio-Orchestre de Zurich, Pierre Colombo, diffusé le 7 décembre 1958 sur l'émetteur de Beromunster